dimanche 8 janvier 2017

Pourparlers politiques en RD Congo: Volte-face

48 heures après la signature d’un accord sous la médiation des évêques catholiques.
Un espoir brisé à l’aube de 2017 en RD Congo.


A Bukavu, dans l’Est de la RD Congo, la première messe de ce 1er janvier 2017 est traditionnellement lue par l’archevêque métropolitain (Mgr Maroj) qui, ce jour, au cours de son homélie, en a profité pour informer les fidèles catholiques de l’aboutissement plus ou moins heureux des négociations politiques chapeautées par la CENCO à Kinshasa. Il a rassuré son auditoire: les choses étaient sur de bons rails malgré quelques velléités des politiciens qui tirent chacun de leur côté pour arracher un maximum de concessions à l’autre parti... Alors que la déclaration de la Conférence épiscopale des évêques, optimiste, estime, elle, que le compromis politique dégagé règle une grande partie de préoccupations. Vingt-quatre heures après cette homélie, la majorité présidentielle vient de se rebiffer. C’est carrément un revirement, mieux dire, un retour à la case départ.
Dans un article précédent, CAPSA-GL avait déjà publié une analyse de ces convocations quasi-rituelles de longs "dialogues", "états généraux", "conférences", "séminaires", "ateliers" et autres "consultations" qui n’en finissent pas. Ce dernier épisode nous donne encore raison, hélas…

Alors qu’à ce stade(1), un nouveau compromis pour la gestion consensuelle de la RD Congo, "Opposition et majorité", venait d’être ratifié sous les auspices des évêques catholiques (compromis qui aura quelque peu atténué voire désamorcé les vives tensions dans le pays), c’est maintenant au tour du camp de la majorité présidentielle de le rejeter après moins de 48 heures de vie. Ce dernier compromis, pourtant fruit d’âpres négociations et de concessions tant de niveau national qu’international, avait le mérite d’avoir rapproché un plus grand nombre de protagonistes...
Mais à son tour, la majorité présidentielle dénonce sa non-inclusivité, et ses aspects anticonstitutionnel, sous l’argument qu’il a verrouillé la route à une éventuelle modification de la constitution et à la tenue d’un quelconque référendum pendant la transition… (La majorité présidentielle s’appuie sur l’article 5 de la Constitution qui dit que le peuple s’exprime soit par l’élection soit par voie référendaire).

C’est après avoir signé ledit accord que les signataires de la majorité présidentielle viennent proclamer dans les médias que la CENCO a outrepassé son mandat en se rendant souveraine et qu’elle n’avait pris en compte que les revendications du rassemblement de l’opposition.
Malgré cela, la médiation reste confiante. Elle signe et affirme qu’il ne reste plus que de petites retouches portant sur des modalités de mise en œuvre et que les pourparlers se poursuivront jusqu’au balisage de la totalité des préoccupations. Entre autres questions de cet agenda post-signature, on retrouve notamment la constitution d’un autre gouvernement en remplacement de celui de Samy Badibanga qui n’aura que moins d’un mois ou la constitution de l’équipe de suivi de la mise en application de l’Accord signé…

Quelle est la prochaine étape?

Pour les analystes de la crise congolaise, les évêques et certains autres optimistes se seraient trop vite frotté les mains, alors que manifestement, rien n’est gagné. D’une part, l’accord du centre interdiocésain vient restreindre certaines prérogatives du Président Joseph Kabila (chose qu’il n’entend manifestement pas un seul instant d’une bonne oreille) pendant cette année de la transition et vient, de plus, placer l’organisation des élections au centre des préoccupations (les mêmes élections qu’il a, à dessein, bloquées, moyennant de multiples faux fuyants).

Apparemment, la majorité présidentielle se trouve à bout de toute patience. Sa volonté de se maintenir est de plus en plus manifeste. Ou ça passe ou ça casse!!! C’est pourquoi des vraies mesures de décrispation politique tant exigées ne font toujours pas partie des préoccupations des dirigeants actuellement en fonction. Ainsi par exemple, les prisonniers politiques et d’opinions ne sont relâchés qu’au compte goutte. Et le Président qui, logiquement ne devrait plus se représenter, n’a toujours pas proposé un dauphin de son camp comme cela est d’usage en politique moderne. Par contre, à longueur de journée, dans les médias comme dans la communauté, c’est l’exhibition à dessein des (faux) indicateurs de l’amélioration du bien-être de la population, sans que cela ne se constate dans le quotidien du congolais

Loin donc de tout élan de décrispation politique, on assiste chaque jour à son contraire. L’annulation récente de l’immunité parlementaire du député Kyungu W, en vue d’accélérer sa poursuite en justice pour outrage au chef de l’état, ne pourra que susciter de nouveaux remous quand toute la vérité sera portée à la connaissance des congolais qui chuchotent tout bas ce que cet élu du Katanga exacerbé par le système Joseph Kabila a osé crier tout haut.

A quoi aura servi un deuxième dialogue si les résolutions subissent pareil sort ?

La publication des résolutions du Dialogue facilité par la CENCO à la veille du nouvel an a suscité beaucoup d’optimisme au sein de toute la communauté nationale. Mais au regard des derniers développements et de la volte-face du camp présidentiel, les espoirs pour une alternance pacifique et apaisée semblent s’envoler. Pareil durcissement abusera certainement de la patience des médiateurs, et surtout de la population qui avait encore placé un brin de confiance dans la démarche des évêques. De tous temps, les évêques catholiques ont joué un rôle déterminant dans ce grand pays à plus de 70% catholique. Mais avaient-ils bien pesé le risque en se lançant dans cette démarche pleine d’embûches face à un pouvoir déterminé à se maintenir contre vents et marrées?
Boutros Boutros Ghali n’a-t-il pas dit que lorsqu’une médiation a réussi, le médiateur disparaît mais quand elle échoue le médiateur est pris pour un bouc émissaire? Déjà certaines langues taxent ces derniers de complice ou de corrompus car leur entrée dans la danse a donné du répit à un pouvoir qui était pris en étau et au pied du mur face à des dates butoirs pour son dégagement forcé par la masse désabusée à la burkinabé. L’église catholique aura eu le mérite et le courage de tout tenter et de prendre ces risques pour tenter d’éviter de nouvelles violences destructrices et sans lendemain.

Deux Dialogues consécutifs en 3 mois: un artifice du pouvoir qui a payé gros.

D’aucuns avaient déjà prédit que ces dialogues n’avaient comme seul but de faire passer du temps, mieux d’endormir le peuple. Le Dialogue de la cité de l’OUA, placé à dessein à quelques mois de la fin du mandat présidentiel, a permis de créer de l’espoir et atténuer la menace sur le pouvoir au 19 septembre 2016. Celui de la CENCO aura lui permis au pouvoir de passer le 19 décembre - date de la fin théorique du mandat de Joseph Kabila - sans la moindre pression de la population. Et comme pour flouer les évêques, initiateurs du second dialogue (dit du Centre interdiocésain de Kinshasa), le chef de l’état nommera un Premier ministre à près d’une heure de la fin officielle de son mandat alors que le poste du Premier ministre de cette transition faisait partie des enjeux mis sur la table des négociations par l’opposition qui n’avait pas pris part au 1er dialogue. La distraction, ce sera aussi le social brandi avec emphase dans le programme du gouvernement, en vue de faire miroiter à la population un début de solutions face aux précarités des conditions de vie pour cette année 2017 électorale, pour laquelle pourtant, comble de l’ironie, le budget s’est réduit de moitié…

Encore combien de temps pour pareille stratégie de rouleau compresseur?

Difficile de prédire, pour l’instant, combien de temps cette stratégie pourra porter. La RD Congo étant un pays non seulement d’extrêmes paradoxes mais aussi des surprises atypiques. Néanmoins, analyse faite, malgré la longue patience des congolais, le pouvoir ne donne aucune impression d’en démordre. Dans son machiavélisme, il se trouve conforté d’avoir entraîné tout le monde sur un terrain où lui seul tient les commandes et contrôle les règles du jeu. Il peut convoquer des dialogues à volonté mais ne signe aucune des résolutions, comme si il n’était aucunement astreint de les respecter. Le pouvoir se trouve aussi renforcé par l’impressionnante machine répressive mise en place, avec la peur comme effet dissuasif envers la population et les mouvements des indignés… Le pouvoir médiatise habilement la mort des manifestants qualifiés d’avance d’ennemis de la paix.

Le chef peut-il être taxé d’être prisonnier de son propre camp comme ça l’a été dans certaines situations? Ou, au contraire, pour protéger les avantages acquis par sa famille biologique et politique(2), l’actuel système compte-t-il désormais sur leur indéfectible soutien pour maintenir son hégémonie au seul argument que sa chute serait aussi la leur. On est à un stade de jusqu’auboutisme.

L’urgence d’un Plan B s’impose

Pour éviter les 4 scénarios du pire (3), tels que glanés dans notre article précédent, et devant l’épuisement de toutes les voies pacifiques par le dialogue, dont la dernière en date avec les bons offices de la CENCO, et comme le doute n’est plus permis sur la mauvaise foi des acteurs politiques; un éventuel plan B devrait indubitablement savoir qu’on est en face d’un Joseph Kabila qui sait désormais que :

  • l’opposition nationale et la société civile officielle sont désagrégées et ne constituent plus une menace pour son système, bien au contraire ils courent derrière lui pour accéder aux miettes.
  • la communauté internationale a montré son impuissance face à la situation qui perdure au Burundi, en rapport avec le risque de réveiller un nouveau génocide. Par prudence, il est certain que personne ne pourra s’engager contre lui au Congo.
  • Obama et Hollande qui lui avaient ouvertement retiré la confiance sont en fin de mandat et donc ne constituent plus de menace pour lui.
  • Malgré l’hécatombe et la destruction systématique du pays, cinq ans durant, Bashar Alassad est resté jusqu’aujourd’hui le seul président de la Syrie.
  • Sassou Ngwesso, Ali Bongo et récemment Yaha Jameh de la Gambie sont restés à la tête de leurs états respectifs contre la volonté de leurs populations et d’insistantes menaces de la communauté internationale.

Les politiciens, la société civile, la CENCO, la communauté internationale restent perplexes devant la situation qui prévaut en RD Congo. Plusieurs ingrédients clairsemés dans le firmament politique de la RD Congo viennent d’estomper tous les espoirs fondés sur 2017.
Les discours et autres intentions de bonne volonté ne rassurent plus personne...


Le 5.01.2017
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(1) Ce nouveau compromis survient pour parfaire celui de la Cité de l’OUA, en octobre dernier, estimé inclusif par la majorité présidentielle et de non inclusif par l’opposition et la communauté internationale.
(2) Entendu, famille politique et biologique mais aussi tout son lobby lié aux pays voisins…
(3) RD Congo: l’issue d’un Dialogue à la croisée de l’absurde et/ou de l’impasse.

RD Congo: l'issue d’un Dialogue à la croisée de l’absurde et/ou de l’impasse.

Crash à l’atterrissage!

Cette analyse devait paraître en septembre 2016. Il n’a pas été possible de la rendre publique. Nous vous invitons cependant à la lire pour mieux comprendre l’article suivant qui analyse les derniers soubresauts consécutifs à la signature de l’accord signé en RDC le 31.12.2016.

Voici une semaine que circule dans les salons politiques et les débats publics ce projet d’accord politique issu du Dialogue tel que remis aux participants du Dialogue pour analyse, approbation et publication. Bien au-delà des divergences de fond, ce ballon d’essai a vite été taxé d’assassinat pur et simple de la Constitution (sic Busa, député de l’opposition)… Pour les non-partants, l’actuelle situation (d’impasse pour les uns et d’absurde pour d’autres) était bel et bien prévisible. Mais, une partie des participants se dédit que c’est encore possible d'organiser l'élection présidentielle dans le délai alors que le Vice-président de la CENI vient de la déclarer pour 2018 dans les médias (1).
Dorénavant, ce projet d’accord en question tel que conçu, vient de susciter d’énormes méfiances jusqu’à être perçu comme étant une provocation de la majorité présidentielle, apprend-on. En substance, selon quelques juristes, le dit projet serait en violation de la Constitution dans beaucoup de points au seul but de "prolonger le contrat du chef au-delà de son mandat".

Quels signes avant-coureurs du crash ?

Le Dialogue pour les élections apaisées aura été décrété par le Politique et non pas par la volonté de la population et, de surcroît sur fond d’une crise qualifiée d’artificielle. Il va de soi dès lors que jusqu’à la fin du Dialogue, de fortes suspicions sur la sincérité de l’Accord persisteront. La tâche aura davantage été compliquée par le fait de non-inclusivité des sensibilités politiques au pays. En effet, si dans le chef des acteurs à l’écart du jeu, pareil dénouement était prévisible, cette fois, c’est dans le camp des pro-dialogues que les derniers soulèvements du 19 septembre 2016 appelant l’alternance, ont quelque peu suscité du recul. A contrecoup, la détermination des manifestants devant une répression sanglante de la Police et de l’armée aura poussé les protagonistes à plus de responsabilité dans la suite des travaux et probablement dans l’adoption finale dudit accord politique.
Par ailleurs, tant que le Dialogue et son accord politique ne régleront pas les problèmes sociaux (vitaux), le malaise persistera et ira de mal en pis, et les manifestations des différents groupes et mouvements citoyens se succéderont, de même que les représailles se poursuivront. Ce qui laisse à présager que pour les trois mois qui nous séparent de la fin 2016, le bras de fer pourrait se durcir malgré l’existence d’un accord monté entre politiciens. Ainsi, tant que la confrontation persistera entre les tenants du pouvoir et les manifestants, le risque d’in-gouvernabilité devra inévitablement contaminer toutes les provinces en signe de solidarité avec Kinshasa, la Capitale du pays. Ceci est dit par expérience du passé…

Ce jour, rien qu’en parcourant quelques déclarations incendiaires des porte-voix de la majorité présidentielle, on se rend de plus en plus compte que rien ne pourra empêcher l’actuel pouvoir de commettre davantage de bévues voire encore des pertes des vies humaines. Tout prête à croire qu’il s’y était plus concentré que de préparer les élections budgétées à 250 millions de dollars par an. Vraiment, rien n’empêchera ce Pouvoir d’utiliser son matériel pimpant neuf acheté de l’Ukraine en 2015 pour mater les manifestations publiques pendant que le budget d’éducation, de la santé sont restés à moins de 5% avec un taux de réalisation inférieur à 50%, et que celui de la Présidence de la République connaît chaque année un dépassement de plus de 250%. Devant cette situation, la communauté internationale semble moins menaçante, peut-être pour éviter d’être taxée de jouer à deux-poids-deux mesures face au silence qu’elle entretient vis-à-vis des cas similaires dans la région. (Rwanda, Burundi, Congo Brazzaville, Ouganda, et tout récemment le Gabon…)

L’objectif final des politiciens était de faire table rase, d’enterrer définitivement l’actuelle Constitution juste après le Dialogue. Encore une fois, l’inclusivité leur aura fait défaut.

Dans le contexte actuel où, le Président Joseph Kabila reste le seul maître de céans. On attend qu’il se prononce sur le fait qu’il ne se représentera plus, ou qu’il puisse libérer les médias, les prisonniers d’opinions, le socio-économique…Il se tait ! Comprenez donc qu’il agira à son gré, comme il l’entendra et quand il le voudra. Mais si la population est conscientisée sur ses droits et ses prérogatives régaliennes, les forces politiques attendront en vain le quitus du Président pour faire changer les choses. C’est clair, devant son obsession de rester au pouvoir, Monsieur le Président donne les allures de jusqu'auboutiste pour son maintien à la tête de l'État, tant que personne ne l'en empêche. Dans ces conditions, les chances d’une solution politique consensuelle pacifique deviennent minimes.
Au demeurant, si le Président et son camp ne le perçoivent pas encore, tout au moins les signes de temps sont déjà là pour le signifier et, l’histoire de ce pays regorge d’exemples depuis la fin tragique du règne de Mobutu. D’ailleurs, nombre d’entre les partisans de Mobutu œuvrent aujourd’hui aux côtés de l’actuel pouvoir.
Quant à la population, au bord du désespoir, elle s’en prend activement à la Communauté internationale, chuchotant que celle-ci connait tout ça mais qu’elle hésite, remet, attend pour se reprocher plus tard que : "Nous n’avons pas pu… Nous aurions dû…"

Voilà autant d’ingrédients qui poussent à penser à quatre scénarios tragiques et probablement réalisables soit cumulativement soit simultanément ou encore séparément. Tous les quatre dans l’optique de maintenir l’actuel régime. Dès lors, le Dialogue s’avère n’être qu’un leurre pour les populations mais un véritable deal pour les politiciens de la majorité, de l’opposition et dans la moindre mesure pour quelques acteurs opportunistes de la société civile plurielle.
Et dans ce cas, seuls les mouvements citoyens du genre de Filimbi, Lucha, les Indignés jouissant de plus d’indépendance, placés à l’écart de ce jeu seront encore crédibles pour porter les revendications légitimes de la population.

Quatre scénarios probables


Scénario 1: enlisement et pourrissement à la burundaise ou à la syrienne...

... où Bachar Alassad reste au pouvoir contre la volonté d’une partie de sa population et malgré les pressions internationales. C’est dans ce sens que le Président sortant pourrait à son tour tenter de trouver quelques soutiens externes qui pourraient le tirer d’affaires. Dans cette optique, en Afrique, on compte six chefs ayant intériorisé la même logique, dont le Rwanda voisin qui, par le passé, a bénéficié du règne du Président congolais. Rien de plus reconnaissant que de lui venir en aide dans ce sens! En rappel, dans une des grandes réunions des Nations Unies, on a suivi à la télévision le Secrétaire général des Nations Unies Ban Ki Moon s’adresser sciemment, en blaguant ou par mégarde, au Président Kagame, citant le Président de la RD Congo… Devant cette boutade peut-on se permettre de supposer ce dernier être pour Joseph Kabila ce que Poutine est pour Bashar Alassad?


Scénario 2 : tabula rasa, table rase

Ce serait pratiquement une rébellion qui devra tout effacer (trouble - terre brûlée - insurrection…) qui pourrait bénéficier de plusieurs bases arrières placées dans les pays voisins. Les guerres de 1998 ont permis au Rwanda, Burundi, Ouganda, Angola, Namibie, Zimbabwe d’entrer en RD Congo et pour s’en départir, il a fallu des années et d’âpres négociations internationales jusqu’au reniement de la souveraineté nationale. Aussi, à l’interne du pays on trouve encore plusieurs groupes armés nationaux et étrangers qui n’ont jamais déposé les armes et qui n’attendent qu’une étincelle sur une brindille pour accompagner une nouvelle rébellion sur le territoire congolais. Si ces rébellions ont décimé des milliers de personnes innocentes, nombre des personnalités actuellement aux affaires sont l’émanation de ces guerres d’agressions et des rébellions de 1997 à nos jours. Que de fois on a entendu que, pour être considéré et avoir des avantages dans ce pays, il faudrait avoir son groupe armé pour faire entendre sa voix. La guerre leur a payé mieux que ce qu’un homme ordinaire pourrait gagner dans des situations normales. En effet, c’est pendant les guerres aussi que certaines personnes, quelques firmes ont eu à s’enrichir follement. A force de l’usure, quelques mouvements citoyens à la une n’hésiteraient pas d’être tentés à prendre part à ce festin pour autant qu’ils prétendront de l’intérieur mettre fin à l’injustice et aux inégalités. On peut penser que ce scénario serait le plus probable car il occasionnerait encore une fois l’invasion du pays par les nostalgiques de leurs temps de gloire à réitérer leur exploit et en tirer des dividendes. Ceci parce que le peuple congolais a plus que tout horreur de la guerre et a accepté toute concession pour éviter la guerre. Le gouvernement atypique 1+4 en a été une illustration. Mais aussi, pour gagner les élections de 2006 avec un score olympique de plus de 80% du suffrage exprimé dans les provinces de l’Est endolories par les multiples guerres répétées, l’actuel pouvoir et même les églises disaient que voter pour Joseph Kabila était voter pour la paix et le contraire était entendu voter pour la guerre. L’actuel pouvoir est le produit de la rébellion, en majeure partie appuyée par le Rwanda. Les derniers événements de ces deux années passées pourront mieux illustrer la question: en janvier 2015 et septembre 2016, destructions importantes sans réserve ni respect des réalisations du pouvoir, morts avec l’appui des acteurs du secteur de sécurité (PNC, FARDC, ANR, DGM, GR…).

Scénario 3: un coup de force (coup d’état civil ou militaire)

Déjà, à l’aube de l’Indépendance de ce pays, pendant que les congolais raffolaient de la fin de la colonisation pour enfin aspirer à un idéal de liberté et de leur souveraineté, Mobutu, appuyé par les mêmes grandes puissances colonisatrices déboutera le gouvernement Kasavubu et Lumumba sera tué. Présentement, le probable coup de force serait monté et réalisé par des acteurs loin de tout soupçon d’être de mèche avec l’actuel pouvoir. En gage de réussite, le putschiste pourrait même habiller les desideratas des communautés pour s’attirer la sympathie de la population au départ, quitte à être dévoilé plus tard à partir des actes et des positions en contradiction avec quelques questions de souveraineté nationale. La caution de la Communauté internationale (les faiseurs des rois) sera indispensable. Au fait, pour que ce coup de force survive, le putschiste serait potentiellement de l’obédience de l’actuelle écurie qui a beaucoup d’intérêts existentiels à protéger et des vies à sécuriser. Ceci au regard du fait que jusqu’à quelques jours de la fin de son mandat, le Président n’aura pas proposé à son camp un seul dauphin qui ferait sa succession comme il est acquis que l’actuelle constitution ne lui autorise pas de postuler malgré son obstination à se maintenir. De ce coup d’état, il surgirait un outsider qui feindrait tout au début d’être l’homme de changement mais qui par la suite ne sera placé que pour protéger les intérêts des pays voisins ainsi que ceux de certains partenaires internationaux à travers tant de contrats signés pour des décennies…

Scénario 4: Les élections dans un court délai

Devant une pression constante, et seulement si elle est bien canalisée, le camp présidentiel (MP) pourrait toujours arriver à précipiter l’organisation les élections à la sauvette. Ceci juste pour couper l’herbe au pied des négociateurs dans le cas où ces derniers arrachaient une transition sans JK. Ceci serait autant possible au regard de l’arrivée des kits électoraux qui sont en train de venir au pays ces derniers jours. C’est curieux que tout en invitant la population à l’apaisement la communauté recommande de faire le Dialogue dans le respect de la Constitution et de la résolution 2277 des Nations Unies. Difficile de comprendre quand on sait que l’Accord Politique tel que conçu ne pourra cheminer de pair avec la Constitution. Mais si la pression s’éternisait ; ils pourront rapidement les organiser et, au besoin les boutiquer à partir de la base où ils auront placé les leurs dans les nouvelles circonscriptions.

En définitive

La question à ce niveau serait de savoir lequel des 4 scénarii (enlisement-pourrissement, table rase, coup d’état, ou élections à la sauvette) serait porteur de moins de casses en premier pour les plus forts (occidentaux et leurs alliés) et ensuite porteurs du moins d’effets collatéraux dans la communauté congolaise meurtrie. Toutefois, il n’est pas exclu que, dans tous ces scénarii, la répression puisse être de la partie car le pouvoir manifeste actuellement beaucoup d’agressivité.
Pour mémoire, en 2001 pour faire passer sans casse l’actuel chef de l’Etat à la tête du pays, ses mentors, qui maîtrisaient bien la politique du Congo savaient que le défunt Kabila était aimé de son peuple. C’est ainsi qu’il a fallu montrer que le jeune président entrant, fils de son père, en était l’émanation. Dans les cérémonies d’intronisations coutumières on dit souvent: "Le roi est mort, vive le roi".
Mais comme aujourd’hui on sait que la plupart des congolais ne veulent plus de celui-ci, on a tenté de créer une opposition factice avec Moïse Katumbi, les G7, qui jusqu’à ce moment ne semble pas avoir emballé la majorité du peuple congolais. Ce qui mettrait cette communauté internationale dans l’embarras.
Dans certains milieux on a entendu dire que: "le Président Joseph Kabila serait le dernier président de la RD Congo sous l’actuel format d’un Congo uni." En d’autres mots, après lui, c’est le Congo en morceaux. Mais à lire dans le passé, on se rend tout de même compte que c’est dans des moments comme celui-ci que les congolais montrent qu’ils sont unis. Dans nos conclusions en rapport avec les élections passées au pays, nous avions révélé que "si les élections ont divisé les congolais avec l’éveil de l’identitaire territorial/tribal, par contre la guerre et les autres rébellions les ont plus poussé à l’unité". Ce qui a permis de désillusionner les tenants de la thèse de la balkanisation de l’est pour aider le Rwanda.
29/09/2016

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(1) 
Propos de Norbert Basengezik recueillis sur la Télévision nationale ce vendredi 30 septembre devant la diaspora congolaise de l’Afrique du Sud où ce dernier se trouvait en mission officielle d’acquisition du matériel.