jeudi 25 janvier 2024

Fragilité de la démocratie politique en RD Congo

La fin de l’année 2023 a été marquée en RDC par la tenue des élections présidentielle, législatives et provinciales. Nombreuses furent les critiques sur leur préparation, les questions logistiques, ainsi que sur les irrégularités nombreuses qui ont émaillé les jours d’élection et le décompte des résultats. Certains y voient une farce électorale. D’autres mettront l’accent sur le verre à moitié plein, insistant sur le fait qu’elles se sont tenues dans les délais prévus, sur un territoire immense, où les difficultés de déplacement et logistique constituaient un défi énorme. On peut aussi souligner le calme relatif dans lequel elles se sont déroulées et surtout le fait qu’une fois de plus, l’alternance possible ait pu se jouer de façon pacifique. Tout cela est certes appréciable. Est-ce pour autant suffisant pour affirmer que nous sommes une démocratie véritable ?

Le témoignage ci-dessous ne met pas l’accent sur les irrégularités du processus électoral. Il met le doigt sur la prolifération des partis et sur le nombre invraisemblable de candidats. Cet élément, peu mis en exergue dans les critiques habituelles, est pourtant une question importante, qui révèle à elle seule la faiblesse de notre démocratie politique.

Comme de nombreux pays pauvres, notre Etat n’est pas capable d’assurer le développement économique du pays, de façon essentiellement autocentrée, pour autant même que ses élites en aient l’objectif et la volonté… Nos richesses sont la proie de l’avidité de grandes puissances et de multinationales. La corruption est un des moyens pour celles-ci d’y avoir accès à bon compte. Dans ce contexte, disposer du « pouvoir de l’Etat » est un des moyens les plus sûrs et des plus faciles de s’enrichir.

C’est bien ce qui motive d’abord ces milliers de candidats aux élections diverses. Gagner un mandat devient le moyen le plus sûr d’assurer son bien-être celui de sa famille.

Les options, les objectifs et projets politiques ne sont que façades et discours pour séduire et ne constituent nullement des programmes crédibles…

Il est à craindre que cet état de fait ne perdure encore de longues décennies. Qui pourrait croire que le changement nécessaire dans notre pays puisse venir d’élites politiques, quelles qu’elles soient ?

Qui pourra alors constituer le catalyseur indispensable des mobilisations populaires ? Une intelligentsia éclairée, travaillant en symbiose profonde avec des forces populaires, avec les paysans qui constituent la majorité de notre peuple, s'appuyant sur des structures de la société civile qui, en dépit des difficultés qu’elles rencontrent, n’en constituent néanmoins un véritable espoir et point d’appui de la population ?

Après ce dernier épisode électoral, ces questions restent ouvertes, plus que jamais.

RDC: la sarabande électorale ou la périlleuse prolifération des monstres


Comme dans une salle de théâtre, le rideau de l’histoire est tombé sur l’année 2023.

L’un des grands évènements pour la RD Congo, était l’organisation des élections générales en date du 20 décembre 2023.

Des vacarmes bruyants et désordonnés fusaient de partout en milieu urbain comme en milieu rural. Les cités et les artères des grands centres urbains étaient arrosés par des musiques assourdissantes qui vantaient les qualités et les idées novatrices - pour ceux qui en avaient - ainsi que ce qu’ils voulaient faire, une fois élus.

La campagne électorale s’apparentait plutôt à un bal des éboueurs où s’affrontaient, selon les médias, environ cent milles candidats à tous les postes, se disputant les faveurs de quarante-quatre millions d’électeurs congolais enrôlés.
 

Confusion totale et triomphe de la cupidité


Si des candidats à la présidence sont pour certains des élites issues de l’ancien régime de Joseph Kabila, d’autres sont issus des milieux divers mais aisés. Cependant, nombreux sont des intellectuels avec un niveau d’instruction quelque peu enviable. Par contre les candidats à la députation nationale et provinciale ou aux conseils communaux, sont un enchevêtrement de tout et de rien: on y retrouve des professeurs d’universités, des médecins, des enseignants, des commerçants, des pousse-pousseurs, des coiffeurs, des tailleurs, des pasteurs d’églises de réveil, des cambistes, des étudiants, des ministres et autres députés en fin mandat et ces derniers en surnombre comme pour ne pas quitter la mangeoire. Quelle confusion totale chez les électeurs !

Tous s’affrontaient sans complexe, sans pudeur ni humilité. On trouvait parfois deux ou trois candidats dans une même famille où l’un est candidat député national, son frère, candidat au niveau provincial et un cousin ou neveu candidat aux municipales. J’ai connu un cas où dans une famille, le père était candidat au poste de député provincial en même temps que la petite sœur de son épouse alors qu’ils habitent la même maison ! L’homme accusait son épouse de faire campagne pour sa petite sœur !

Et comme toujours les plus forts financièrement voulaient prendre plus pour eux-mêmes.

Aussi, l’on a vu un candidat à la fois à la députation nationale et provinciale dans deux circonscriptions différentes d’une même province. S’il gagne dans cette loterie électorale, la cupidité pathologique de « l’honorable » n’est pas saturée. Il ambitionne de devenir Ministre, Gouverneur ou Sénateur. L’autoroute du pouvoir et de l’avoir est ouverte désormais.

A Bukavu et à Goma, des villes enthousiastes, avec leurs bidonvilles déprimés, sans arbre, formant des ensembles de logements précaires, la campagne s’est déroulée dans des stades municipaux ou du moins, ce qui reste de cet héritage colonial. Très boueux, les « stades » sont les lieux de rassemblement des candidats qui se succédaient et se côtoyaient.

A part quelques incidents mineurs, la campagne électorale n’a pas été violente ni à Bukavu ni à Goma. Mais en revanche, à Kindu dans le Maniema, on a déploré un mort du côté de l’UDPS (Union pour la Démocratie et le Progrès Social), le parti du président sortant.

De même qu’à Lubumbashi, dans le Katanga, Mbuji Mayi, Kananga et Kinshasa, des actes de violences ont été signalés par la police.

Partout aux abords des routes et sentiers défoncés, on observait des affiches de photos des hommes en cravates. De cette sarabande électorale, comme dans toute danse rythmique, les femmes ont répondu à l’appel. Des femmes parées comme des sapins de Noël, mais dont l’image cadrait mal avec l’état de pauvreté dans lequel vit la majorité des candidats.

Tous, ou dans l’ensemble, ont de nombreux points communs : la recherche de l’argent, en gagner vite et au maximum. La cupidité, la soif du pouvoir, l’opportunisme. Nombreux d’entre eux ne savent pas lire ou écrire correctement le français, la langue officielle de la RD Congo. Presque tous ne connaissent rien du processus législatif, et donc du rôle d’un député ou celui d’un conseiller municipal pour lequel ils sont candidats.

A Bukavu, ils sont environ 700 candidats pour 7 sièges disponibles à la députation provinciale et plus de 500 candidats pour 5 sièges pour la députation nationale. Tous répartis dans plus de 950 partis politiques.

Il est possible que la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) ait retenu tous les candidats qui ont postulé sans tenir compte ni de leur cursus, leur compétence ou leur niveau intellectuel, dans le seul but d’encaisser leurs cautions. À chacun son dû ! Apparemment toutes les candidatures ont été déclarées recevables. Alors que la loi électorale fixe le minimum d’études pour un candidat à la députation au niveau du BAC +3. L’on pouvait, sans effort, identifier des candidats dont le niveau de connaissance est à la frontière de l’illettrisme.

Spectateur de la vie politique de mon pays, je me disais que la médiocrité était le lot des Africains mais je me suis rappelé des propos tenus par certains Américains à Barack Obama lors des campagnes aux sénatoriales à Chicago : « Vous avez l’air d’un garçon gentil, pourquoi voulez-vous vous embarquer dans un truc sale et méchant comme la politique ? ». J’étais particulièrement familiarisé avec cette question, elle dénotait d’un certain cynisme…un cynisme nourri par des promesses non tenues (Barack Obama, L’audace d’espérer, 7).

Je compris les limites de mes connaissances de la politique dans ce monde immonde, car pour moi, les politiciens occidentaux avaient une certaine éthique et déontologie. Cette question m’a fait comprendre que même en Amérique ce métier n’inspire guère confiance.

La même question, j’aurais pu la poser au prix Nobel de la paix, le très respecté, Dr Denis Mukwege, candidat à la présidentielle en RD Congo, le 20 décembre 2023, mais je n’ai pas eu ce privilège !

La campagne pour les candidats à la présidence aura été féroce, avec une industrie d’insultes et de provocation. Les uns accusant les autres d’incompétence, de corruption, de turpitude morale, de voleurs, de détourneurs, de manque de vision, d’étrangers ou alliés des étrangers.

La politique est un sport violent.

Sur les 26 candidatures retenues à la présidence par la CENI, 7 se sont désistées, s’alliant les uns au président sortant Mr Felix Antoine Tshisekedi, les autres à Mr Moïse Katumbi le second prétendu favori de ce scrutin. Sur les 19 autres candidats en lice, seuls trois ou quatre ont quitté la capitale Kinshasa et ses alentours. Les autres sont restés terrés dans la capitale. Les électeurs, dans cet immense pays, ne les ont entendus que dans les médias.

D’autres n’ont été ni entendus, ni vus ! Pourquoi ont-ils été alors candidats dépensant chacun plus de 50.000 dollars pour le dépôt des dossiers ? Question de paraitre ou d’apparaitre et peut être, être retenu par le gagnant au cas où ?

Dans l’ensemble, leurs discours de campagne sont les mêmes que celui du candidat sortant, ils veulent des alternances, mais sans des alternatives innovantes. Ils rejettent sans projection convaincante :
- la guerre contre les ennemis du pays notamment les rebellions et leurs alliés dont en tête le Rwanda,
- la reconstruction du pays,
- la lutte contre la corruption et l’impunité,
- la promotion des droits humains… tels étaient leurs thèmes de prédilection.
 

J’ai vu, j’ai entendu


J’ai été dépité, dégouté par les discours de certains candidats : « Votez X parce que c’est notre beau-frère, votez-le, il m’a pris dans son gouvernement comme Ministre ! Et un autre, votez Y, il prend le téléphone quand je l’appelle ». Des stupidités !

J’ai vu des gens distribuer de l’argent aux électeurs dans des centres de vote le jour du vote. J’ai entendu parler de batailles rangées entre les enfants et leurs parents pour la répartition de l’argent laissé par deux candidats des partis politiques opposés. J’ai vu des électeurs prendre de l’argent de nombreux candidats des divers partis politiques, alors qu’ils n’ont qu’une seule voix.

J’ai entendu que, des électeurs lors de la campagne électorale, changeaient des t-shirts avec des effigies d’un candidat lorsqu’apparaissait un nouveau candidat avec de l’argent. Un électeur m’a dit, alors que je lui reprochais ce genre de comportement : « on se rencontrera encore où et quand ? Il me donne quelque chose et je lui donne ma voix, c’est du gagnant-gagnant ! »

Ici la vénalité et la corruption franchissent toutes les bornes. Les électeurs se vendaient au plus offrant sans état d’âme. L’élection du candidat Président de la République sortant n’était que rarement discutable. Les ministres, députés sortants et autres riches mandataires invoquaient d’abord l’élection ou du moins la réélection du Président sortant avant de parler d’eux-mêmes. Et cela dans presque tout le pays.
 

Une fin de campagne tragique


Il est sûrement vrai que la campagne a été entachée de beaucoup d’irrégularités dénoncées par les médias et l’ensemble des organisations de la société civile plurielle. Ce fut entre autre: la distribution tardives du matériel électoral, des pannes intermittentes des machines à voter, l’ouverture tardive des bureaux de vote obligeant les électeurs à retourner chez eux sans voter, s’ajoutant à d’autres électeurs qui ne figuraient pas sur les listes électorales, les machines à voter avec des batteries déchargées interrompant le déroulement du scrutin.

Quoi qu’il en soit les Congolais ont voté librement malgré les imperfections dénoncées et la corruption faite généralement par les candidats députés aux électeurs à tous les niveaux. Dans les milieux ruraux, de nombreuses analphabètes étaient les proies préférées. Une paysanne m’a même dit que la machine à voter, était sans aucun doute " un machin d’origine diabolique " ! Elle répondait à ma question de savoir comment elle a pu s’y prendre. Cela n’est guère invoqué dans les dénonciations tant de la société civile que des médias. L’utilisation d’une machine à voter dans un pays où le taux d’analphabétisme avoisine le 46% de la population, est un boulevard ouvert à la fraude électorale. De très nombreux électeurs n’ont jamais vu ou touché un ordinateur. L’éducation reste ici un pivot important pour asseoir la démocratie.
 

Des fraudes


Les médias locaux, les acteurs de la société civile ont dénoncé de nombreuses irrégularités et fraudes qui ont entaché le scrutin. J’ai entendu parler dans les médias locaux de la présence dans une maison privée, d’une machine à voter en pleine opération d’impression des bulletins dans la localité de Chifunzi, dans le groupement de Kalonge en territoire de Kabare, au Sud-Kivu, ce 20 décembre 2023. Le coupable arrêté, a été libéré vers 20 heures du soir par la police et s’est évaporé dans la nature. Pour qui opérait-il ? Ou a-t-il trouvé la machine à voter ? Et pourquoi a-t-il été libéré ? Silence !

Des échauffourées ont été aussi signalées dans les localités de Nyantende, Mumosho, Kabanda suivi de la destruction du matériel électoral, dans le même territoire de Kabare par des électeurs en colère.

En territoire de Mwenga, dans la chefferie de Luhwinja, les machines ont fonctionné de manière intermittente de 9 à 22 heures dans les localités de Luchiga, Karhundu, Mulama, Makala. L’on a même fait recours aux groupes électrogènes des privés par l’intermédiaire des candidats à la députation…

A Burhinyi dans le territoire de Mwenga, les électeurs, à part la distribution de l’argent, discrètement, aux électeurs et les disputes entrainées, les élections ont été calmes, mais de nombreux électeurs sont rentrés sans voter et d’autres ont été omis des listes électorales : un manque à gagner pour les candidats dans ces circonscriptions électorales rurales.

La campagne électorale a été fatale pour Joseph Kasongo Tshomba, candidat député national ville de Beni au Nord-Kivu, tué par un groupe armé alors qu’il revenait d’un meeting près de la rivière Semliki le 15 décembre 2023. Même tragédie à Uvira au Sud-Kivu où Espoir Sadiki a été assassiné quelques jours avant le jour du vote du 20/12/2023. Tous deux sont membres de l’UDPS, le parti de Félix A. Tshisekedi, président sortant.

D’autres tragédies électorales ont été signalées à Kindu, au Kasaï, à Kisangani, à Kinshasa et certainement dans d’autres coins du pays; tant de situations déplorables.
 

De la prolifération des monstres


On peut tout de même se poser la question de savoir quels genres de dirigeants pousseront sur ces amas de corruption, des haines, d’insultes, d’ossements et de sang humain, si ce ne sont que des monstres politiques.

Ces monstres se battent et se débattent pour prendre les provinces par la gorge et le pays tout entier.

Les monstres ont certes existé dans toutes les cultures. Les traditions nous les représentent comme des géants, souvent hideux et puissants. On en parlait, mais personne ne les avait vus.

En RD Congo, il s’agirait des humains à l’esprit de monstres. Pas comme les minotaures de la Crête antique, moitié homme, moitié taureau qui selon le mythe se nourrissaient de la chair humaine.

Ces monstres politiques ressembleraient aux monstres de la Grèce antique, dont l’Hydre de Lerne : c’était un serpent mythique avec 7 têtes, lesquelles si on en coupait une, il en repoussait encore 7 nouvelles, donc en progression géométrique ! Le monstre tuait toute personne imprudente, qui passait dans la vallée où il logeait. Mais selon la mythologie grecque, le serpent fut tué par Hercule… Cela fait partie de ses 12 travaux qui firent de lui un dieu.

En République Démocratique du Congo, on ne sait pas d’où viendra, un Hercule pour « tuer ces monstres » qui s’acharnent sur le pays à travers les élections, élections qui, comme Prométhée, nous apporterait la lumière, le feu qui vivifie, qui réchauffe et qui nous humanise. Mais on connait aussi le sort de Prométhée dans la mythologie.

Ces monstres sont partout, dans les chefferies et les territoires ruraux. Comme le phœnix, l’oiseau mythique qui renaissait de ses cendres. Ils prolifèrent, font semblant de disparaitre et renaissent, comme des herbes en milieu équatorial.

Si vous doutez, voyez un peu le nombre des candidats à tous les échelons. Sans idéal social, sans doctrine moralement et politiquement défendables. A y réfléchir trop, on court le risque d’attraper une migraine, géante comme un continent !

Aussi nous apparaissent comme des monstres ces groupes armés qui ensanglantent le pays depuis bientôt 30 ans : AFDL, RCD, CNDP, M23 et tout récemment Corneille Nangaa qui a créé une nouvelle rébellion, un nouveau monstre ! A partir de Nairobi au Kenya. Lui, Nangaa vraiment ! Avec ce qu’il a fait des Congolais quand il était président de la CENI avec sa bande.

Ces mouvements rebelles, ces terroristes qui tuent des citoyens innocents sans défense, ces autres gazaouis africains, tués par ces « Israëls » d’Afrique, sous l’œil indiffèrent de la communauté internationale qui fournit les armes à ces « Israëls » d’Afrique qui bâtissent leur prospérité sur les calamités humaines et qui brandissent un long glaive à la moindre riposte de leurs victimes.

A l’instant où nous vous écrivons ce papier en RDC le dépouillement des bulletins de vote pour les députations se poursuit avec une cohorte de protestations.

Ces monstres pourraient proliférer sous prétexte de fraude électorale, de « la vérité des urnes » alors que leur poids électoral pesait moins que... la plume d’un colibri ; des démons à exorciser. Il est certain que les opposants désunis et ne parlant pas le même langage ne pourraient pas faire face au Président sortant, puisant dans les caisses de l’Etat et tirant sur la corde d’un nationalisme pour défendre le peuple congolais contre un envahisseur, un monstre froid, un ennemi héréditaire selon plusieurs qualificatifs des congolais.

Dans ce chacun pour soi, il était difficile à l’opposition d’attendre de ces élections autre chose qu’un échec. Les problèmes techniques et autres irrégularités pourraient fournir l’eau au moulin de la contestation, même pour les plus faibles…

Le Président sortant, réélu, selon la CENI a, à peine promis la poursuite « des monstres » que Corneille Nangaa en crée un autre et encore un autre vient de voir le jour selon les médias ! La guerre à l’Est du pays a été invoquée par la quasi-totalité des candidats, laissant les Congolais incrédules et circonspects sur la solution pour éliminer cet ‘’ Hydre de Lerne’’ congolais.

Des députés dépités


Les acteurs de la société civile pourraient se féliciter en faisant passer dans des médias avant les élections un message aux électeurs : « Zéro élu réélu ». A certains endroits, ils étaient hués, accusés de n’avoir pas tenu leurs promesses : hélas !

Seuls quelques géants reptiles connaissant bien les fonds des marigots politiques congolais peuvent s’en sortir.

En RDC, les élections générales auront donc constitué le plus grand évènement de l’année 2023. Elles ont été techniquement déplorables et critiquées comme il se doit, mais elles ont eu lieu, les Congolais se sont prononcés.

Le 31 décembre, la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) a proclamé les résultats des élections présidentielles d’abord, et sans surprise F. Tshisekedi a remporté avec 73,34%. Face à une opposition opposée à elle-même, faible et dont certains monnaient fort leurs convictions politiques, l’autoroute de la victoire était ouverte pour le Président sortant. Il sera investi même si quelques opposants protestent.

Certes des problèmes de tout genre ont émaillés tout le processus électoral mais ne mettent pas en doute l’élection de Félix Antoine Tshisekedi même si le taux du pourcentage pose tout de même quelques questions. La guerre à l’Est et les propos incendiaires envers les rebelles du M23 et leur soutien rwandais ont constitué pour le président sortant un grand pilier pour sa popularité. Il sera bientôt investi, le gouvernement formé, l’Assemblée nationale et le Sénat installés. L’opposition s’épuisera à réclamer, à brandir les irrégularités, les failles et l’illégalité du processus mais la machine aura démarré. Ainsi va l’Afrique.

Puisse l’année 2024, voir surgir une étincelle d’espérance et mettre fin à cette débauche abrutie des cadavres ! Puisse les seigneurs des guerres, ces monstres et leurs soutiens étrangers, être fatigués de leurs folies meurtrières.

Mais nous ne devons pas désespérer pour autant. Dans l’histoire humaine, les constructions des Etats ont toujours été une lutte, une lutte entre ethnies, luttes entre nations, luttes entre prédateurs. Les cathédrales, les châteaux, les belles villes d’aujourd’hui ont été souvent construites par des pilleurs de peuples, des brigands ou, des pirates en somme.

Il nous faudra peut-être à l’instar d’autres nations passer par les mêmes étapes de bricolage politique, de souffrance et de deuil pour donner âme à nos nations. Celles-ci sont une création historique, lente, longue qui tangue vers sa maturité comme un navire sous la vague dans une mer orageuse.

En ce temps, on peut observer une tragique vérité : la guerre ou les élections mal organisées peuvent contribuer à la construction d’une conscience nationale, d’une citoyenneté ou même à la solidification d’une nation.

Regardons les Palestiniens, même si, semble-t-il on veut les forcer à… émigrer vers la RD CONGO ! Et les Congolais qui, malgré leurs diversités culturelles et linguistiques se font enrôler pour défendre leurs pays !

L’Europe, après la chute de l’empire Romain, a eu besoin de plus de 1000 ans pour ériger les fondements de ses nations actuelles. Elle a connu des guerres civiles, des massacres et des viols terribles.

Au seuil de l’année 2024, j’ai voulu partager avec nos lecteurs, brièvement, et avec des lacunes certaines, la situation vue et vécue lors du processus électoral en RDC et bien sûr partager avec eux quelques frémissements de l’espérance.

L’homme, écrivait Bechir Ben Yahmed, est un être prospectif. Il meurt aussitôt qu’il cesse de croire qu’il y a un lendemain.

Nous sommes condamnés à travailler, à patienter et à espérer.

Xavier BASHONJA CIKURU